Invitées par L’Hirondelle, Claude & Sabine, fondatrices de Colorprescription, vous engagent à les suivre sur les chemins de la couleur pour une joyeuse discussion à bâtons rompus.
De la couleur imposée à la couleur choisie
- Claude :
En ce moment nous sommes plongés dans la couleur, aussi bien dans la mode que dans notre environnement.
D’après toi, comment sommes-nous passés de l’apologie de la non-couleur à ce déluge de couleur ?
- Sabine :
Oui c’est vrai, tu as raison, non seulement notre quotidien se colore, mais en plus nous avons tous très envie d’être maître de nos choix, et c’est nouveau.
Il faut dire que nous avons traversé de longues années où, hors du noir, du gris, du beige, du marine et du camel, plus, éventuellement,- une touche de rouge sur les semelles des stilletos et sur la bouche – il semblait impossible de respecter les règles du bon goût.
Tout autre décision était risquée et très vite, taxée de hors norme, ou d’originalité. « C’est un(e) originale ! » disait-on…
Tout à coup, les verrous ont sauté et on assiste à une véritable libération de ces carcans nés des tendances. Finis les diktats largement distillés par les bureaux de style, les « gourous » de la mode et de la maison, et relayés via la presse.
À l’aide des réseaux sociaux, influencé par les street-styles, chacun s’est senti autorisé à prendre la parole. Instagram a rapidement propulsé le mouvement à une échelle mondiale.
Quand le monochrome se réinvente
- Sabine :
D’ailleurs, conjointement à cette arrivée de la couleur tous azimuts, on voit bien que le monochrome, qui est un parti-pris, tient une grande place. Notre concept de Colorprescription s’appuie sur cette envie. Qu’en penses-tu ?
- Claude
Oui, mais ce n’est pas un monochrome tel qu’il était pratiqué dans les années 50 et 60.
À ce moment-là le monochrome était envisagé comme un total-look. Très en vogue, particulièrement aux USA, il était le summum, le nec plus ultra de la convention bourgeoise.
Aussi bien dans la mode, que dans la maison, il fallait tout coordonner, c’était l’affaire des ensembliers !
Chaque saison une couleur était nominée couleur « chouchou ». Pour être qualifié (e) de « trendy » et ne pas commettre d’impair, il fallait la porter !
Le monochrome d’aujourd’hui, bien au contraire, est un nouvel accès à la couleur, libre, facile, tentant, joyeux.
Il est porteur d’un plaisir gourmand, comme si l’on plongeait ses doigts dans un pot de peinture.
Dans les boutiques, y compris les boutiques vintage, les collections sont présentées en camaïeu, en mélangeant au besoin les marques et les modèles.
Certaines marques en ont même fait leur concept, comme Club Couleur, par exemple, qui propose un assortiment de vêtements, papeterie, objets divers, réunis par une couleur unique.
On retrouve aussi le monochrome dans la cuisine. Les chefs inventent des assiettes autour d’une couleur, betterave, tomate, mimosa…et l’on mange la couleur…après l’avoir « instagramisée »…
Devenir acteur plutôt que spectateur
- Claude :
Alors dans cas, pourrait-on dire que nous sommes nos propres designers ?
- Sabine :
Notre œil change, c’est évident. On ne va pas s’habiller tous en monochrome, mais aiguillonnés par cette nouvelle liberté, on a l’impression d’avoir à dispo une grande boite de tubes de couleur à utiliser de la manière la plus personnelle possible.
L’usage de la couleur devient un jeu créatif, rien que pour soi. Un délice à tartiner, à déguster !
Cela nous incite à l’appropriation et à une forme de liberté démocratisée, joyeuse et permissive.
On est déjà devant de nouvelles propositions marketing nettement interactives et radicales. Les marques nous proposent de personnaliser nos palettes de maquillage, de choisir l’anse de notre sac, l’étui de notre rouge à lèvres, de composer nos sneakers avec autant de couleurs et de matières que l’on souhaite.
On est aux manettes !
Profitons-en !